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D'art et d'amour... les couples mythiques

D’ART ET D’AMOUR... LES COUPLES MYTHIQUES

Un mythe persistant représente l’artiste comme un génie solitaire, un individu peu en relation avec autrui car sans doute laissant peu de place dans sa sphère. Pourtant, l'exaltation du sentiment amoureux est dans l’Histoire de l’Art une inspiration inaltérable pour les artistes et est à la base de certains des plus beaux chefs-d’œuvre.

Des couples mythiques ont marqué l’histoire de l’art par leur relation hors du commun, rarement sereine, souvent sulfureuse mais toujours inspiratrice.

Plus beaux tableaux amour magritte

(les amants de René Magritte)

Camille Claudel et Auguste Rodin, un amour toxique

Camille Claudel et Auguste Rodin se sont aimés, admirés, influencés, déchirés... C’est en 1884 qu’ils se rencontrent, Camille a 19 ans, Rodin, 43. Rodin est l'un des artistes les plus célèbres du XXe siècle et est déjà très connu de son vivant. Il vit alors depuis plus de vingt ans avec sa compagne, qu'il ne voudra jamais quitter.

Très vite, une complicité puis une intimité s'installent entre les deux artistes et Camille inspire à Rodin certaines œuvres. Leur union est intimement liée à cette passion commune de la sculpture qui anime toutes leurs discussions, leurs journées et leurs nuits. De cette première période aux cotés de Camille, Rodin écrit : «Du bonheur d'être toujours compris, de voir son attente toujours dépassée, cela a été une des plus grandes joies de ma vie artistique».

Claudel rodin

A une époque où les femmes peinent à trouver une place dans le monde de la sculpture et des Arts en général, on accuse souvent Camille de copier vulgairement Rodin, de n’être qu’une élève. Pourtant, grâce à sa collaboration avec Camille, Rodin exécute des œuvres pleines de sensualité et de lyrisme : L’Eternelle Idole , La Danaïde, Les sirènes, Le Baiser. Les sculptures de Camille Claudel ont aussi un impact sur Rodin. Par exemple, sa pièce de 1886, "Jeune fille à la gerbe", est largement considérée comme ayant inspiré "Galatea" de Rodin, achevé quelques années plus tard.

Galatee rodin    Fille gerbe claudel

Galatée de Rodin                                                      La fille à la gerbe de Claudel

Au fil des années, la relation devient de plus en plus tumultueuse car Camille souhaite ardemment que Rodin quitte sa compagne et s'engage avec elle, mais Rodin s’y refuse fermement. Camille développe alors un sentiment de jalousie féroce.

A partir de 1893, Camille Claudel s’éloigne de Rodin et s’isole dans son travail pour tenter de faire reconnaître son indépendance artistique. Toutefois, sa rupture avec Rodin va, peu à peu, la faire sombrer dans la folie. Elle détruit alors certaines de ses œuvres. En mars 1913, Camille est internée dans un asile psychiatrique et elle y restera jusqu'à sa mort, trente ans plus tard.

Rodin est mort le 17 novembre 1917, après avoir enfin épousé sa compagne, et tout en jurant n’avoir aimé qu’une seule personne, Camille.

 

Frida Kahlo et Diego Rivera, l’éléphant et la colombe

Dans son journal intime, Frida Kahlo décrit sa relation passionnée avec Diego Rivera : “Il y a eu deux grands accidents dans ma vie ”, se référant à son terrible accident qui a failli lui perdre la vie et à sa rencontre avec Diego.

Frida diego

Lorsqu’ils se rencontrent en 1927, Diego est déjà un peintre mexicain renommé, alors que Frida n’a que 20 ans et commence tout juste à peindre. Tout en Diego est démesuré : son physique, son énergie, sa capacité de travail. Frida l’admire. Ils décident de se marier deux ans plus tard, mais rapidement après leur mariage, Diego se montre infidèle. De son côté, Frida n’est pas en reste et ils ont parfois les mêmes maîtresses. Six ans plus tard, Frida découvre que son mari la trompe avec sa propre sœur, Cristina. Frida en est profondément blessée et en décembre 1938, le divorce de Frida et Diego est prononcé.  Malgré tous leurs différends, Frida et Diego, plus amoureux que jamais, se retrouvent en 1940 et se remarient, avec la promesse de Diego de ne plus jamais la tromper…

Tous deux sont des artistes révolutionnaires, engagés dans les combats politiques dans le contexte instable de l’après révolution mexicaine. Ils ont bâti leur légende où se mêlent l’exubérance sudaméricaine, la lutte révolutionnaire et la misère du peuple, la souffrance et l’amour, la nature et les mythes nationaux. Moins encline aux confessions et moins intime, l’œuvre de Diego célèbre le génie du Mexique. Celle de Frida raconte l’épopée douloureuse de sa vie et l’inscrit dans l’imaginaire mexicain.

Img 1584        Frida diego 2         Autoportrait frida kahlo   

Frida Kahlo a un véritable désir de fonder une famille, et elle tente de le faire à plusieurs reprises, mais en vain. La maternité occupe une place importante dans les œuvres de Frida, nombreux sont ses tableaux représentant notamment le drame de ses trois fausses couches. Frida a déclaré : “J’espérais tellement avoir un petit Diego que j’ai beaucoup pleuré”.

Diego accompagne Frida pendant les quatre dernières années de sa vie. Elle a d'ailleurs écrit dans son journal : « J’ai toujours envie de me suicider. Seul Diego m’en empêche. Car je m’imagine que je pourrais lui manquer. Il me l’a dit et je le crois ».

 

Dora Maar et Pablo Picasso, une passion « ravage »

Picasso est un personnage complexe et il est difficile de réellement cerner sa personnalité profonde. Ses proches soulignaient sa simplicité, sa générosité et, en dépit de tout, une forme de modestie : "j'ai passé ma vie à peindre comme un enfant", assura-t-il. D'autres - comme Françoise Gilot ou Marina, sa petite-fille - ont mis en avant sa cruauté psychologique, son côté irascible, sa personnalité d'ogre. Ainsi d’après certains témoignages et biographies, Picasso se serait montré souvent cruel, machiste et autoritaire, jaloux et extrêmement possessif avec les femmes. Néanmoins, il considérait que les femmes étaient pour lui les clés de sa peinture, indispensables à sa création.

Dora Maar, initialement formée à la peinture, s’est tournée vers la photographie au tout début des années 1930. Après avoir été l’assistante de Man Ray, Dora a ouvert un studio de photographie où elle y a fait poser les plus grands modèles du tout Paris. Elle était aussi une femme émancipée, engagée à l’extrême-gauche. Man Ray a dit d’elle qu’elle était « une photographe accomplie dont les photos montraient de l’originalité et une vision surréaliste ». Elle excelle dans ce mouvement grâce au photomontage et est une des rares femmes présentes dans les expositions du genre. Malgré son parcours, Dora est encore souvent cantonnée au statut de "muse" de Picasso.

Picasso dora

En 1936, quand Picasso rencontre Dora, il a 54 ans, elle en a 28. Commence alors une liaison passionnée. Le tempérament affirmé de Dora, sa liberté, son assurance presque virile plaisent à Picasso. Pour lui, Dora n’est pas seulement une compagne ou un simple modèle, mais une véritable source d’inspiration, un nouveau souffle pour son travail.  Dora suivra la progression de l’œuvre « Guernica » en exécutant un reportage photographique sur le tableau en train de se faire. Ils sont alors tous les deux dans la fusion créatrice. Il se dit que, n’ignorant rien du talent de sa maîtresse, il l’empêchera de poursuivre l’expérience et finalement de poursuivre son travail de photographe, brisant ainsi son élan créateur. Ainsi, par amour, Dora abandonne sa passion…

Il la peint pleurant : « Pour moi, admet-il, [Dora] est une femme qui pleure. Pendant des années, je l’ai peinte en formes torturées, non par sadisme mais par plaisir. Je ne pouvais que donner la vision qui s’impose à moi, c’était la réalité profonde de Dora. ». Picasso va multiplier les représentations de Dora : d’abord sa beauté puis il peindra son être torturé par ses démons intérieurs. Elle prendra les traits d’un chien, d’une hystérique, d’une perturbée mentale…. Il est vrai aussi que Dora est une femme torturée, on raconte souvent comment Dora s'amuse à planter entre ses doigts écartés un couteau sur l'une des tables. De temps en temps, elle manquait le but ; sa main était couverte de sang. Devant Picasso, Dora se fait chaque fois plus suppliante : « Je vous aime je ferai ce que vous voudrez je m’inclinerai devant vous devant votre travail devant ceux que vous aimez ou vous avez aimé . […] je vous attendrai aussi longtemps que vous voudrez des années si vous le désirez… » ou encore : « Qu’est-ce que j’ose venir faire dans votre vie ? »

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Tout entière dédiée au peintre durant sept ans, elle connaît « une chute dans la folie » lorsqu’il finit par la quitter pour une autre après 10 ans de relation. « Après Picasso, il ne peut y avoir que Dieu », ces mots de Dora témoignent de l’asservissement volontaire de cette femme pourtant libre et indépendante avant leur rencontre.

Dora sombre dans la dépression avant de vivre recluse, acariâtre et antisémite, en pleine crise mystique, à Ménerbes, dans le sud de la France où elle continuera à peindre des toiles vides de toute présence humaine où le paysage est résumé à des traits vigoureux de couleurs. Picasso, après la guerre, viendra à Antibes puis à Vallauris pour étendre son art à la céramique.

 

Salvador et Gala Dali, 50 ans d’amour fou

Salvador Dalí est bien sûr l'un des plus grands peintres surréalistes, c'était aussi un grand amoureux.

En 1929, Dali est à Paris pour présenter le film qu’il a réalisé avec Luis Buñuel, Un chien andalou. Il y rencontre le poète Paul Éluard et décide de l’inviter, ainsi que d’autres artistes surréalistes, à passer des vacances d’été chez lui à Cadaquès. Paul Éluard s’y rend accompagné de sa femme, Gala. Dès que les regards de Dali et Gala se croisent, c’est un coup de foudre mutuel. Gala quitte Eluard et ils se marient en 1932.

Dali et gala

L’amour de Dali et Gala ne fait pas l’unanimité. Dali a d’ailleurs été chassé par sa famille qui considère Gala comme une débauchée vivant parmi des artistes parisiens aux mœurs douteuses. Le couple étant alors sans ressources, Gala prend en charge l’organisation du ménage et gère les finances et leur vie quotidienne. Elle veille à tout et joue différents rôles essentiels dans la vie du peintre : hôtesse, mannequin, agent, gestionnaire des stocks en toiles et peintures…

Dali a trouvé en elle une muse, une source d’inspiration, une raison d’être de son art. Au début des années 30, le peintre signe d’ailleurs ses toiles avec le nom de Gala. Il lui répète même souvent : « C’est surtout avec ton sang à toi, Gala, que je peins mes tableaux. ». Il la peindra de nombreuses fois notamment dans cette oeuvre où il lui donne le visage de la Vierge Marie, La Madone de Port Lligat.

Port lligat

Gala est la seule personne capable de canaliser Dali dans sa folie pour lui permettre d’aller au bout de son inspiration et de ses visions. Elle aime soutenir cet artiste lui permettant de fréquenter les sphères intellectuelles et artistiques et de s’affirmer comme maîtresse-femme tout en la laissant libre… d’être même parfois infidèle.

Gala pousse son dernier souffle en 1982 dans leur maison, près de Salvador Dalí qui, inconsolable et incapable de vivre sans sa muse, la suit et décède à son tour en 1989.

 Pendant un demi-siècle, entre l’Espagne, New-York, Rome et Paris, rien n'aura raison de leur amour fou: ni les disputes et les réconciliations légendaires qui suivent, ni les escapades de Gala en compagnie de jeunes hommes, ni la relation de Dali avec Amanda Lear.

 

Jane Birkin et Serge Gainsbourg, des excès et des succès

En 1968, Ils se rencontrent sur le tournage du film « Slogan ». Jane a alors 22 ans et lui 40 ans, elle parle un français hésitant avec un fort mais charmant accent anglais. La carrière cinématographique de Jane est alors en pleine ascension, notamment après sa prestation dans le film « Blow up » d’Antonioni, sacré palme d’or à Cannes en 1967.

Serge quand à lui est déjà un artiste reconnu, en tant qu’interprète et auteur de nombreux succès des vedettes phares des années 60 (Juliette Greco, Petula Clarke, France Gall – gagnant le concours de l’Eurovision avec sa chanson « Poupée de cire, poupée de son »-  Françoise Hardy…). À la fin de 1967, il vit une passion, courte mais intense, avec Brigitte Bardot, à qui il dédie la chanson Initials B.B., après lui avoir écrit plusieurs titres emblématiques : Harley Davidson, Bonnie and Clyde, Je t'aime... moi non plus

Serge gainsbourg et jane birkin le 22 mai 1976 lors du festival de cannes 3 663964

Entre Jane et Serge, c'est une histoire d'amour remplie d'étincelles, d'explosions en tout genre et artistiquement inspirante et prolifique. Rapidement après leur rencontre, le chanteur lui fait écouter « Je t’aime… moi non plus »  (que Brigitte Bardot a finalement refusé d’enregistrer).  Il lui propose de la reprendre, ensemble. Ce titre, jugé scandaleux et censuré à l’époque, deviendra un tube international, encore aujourd’hui plébiscité. Ce premier titre sera suivi de nombreuses compositions et albums soignés : Di Doo Dah (1973), Lolita Go Home (1975) et Ex-Fan des Sixties (1978).

Lassée par les excès de Serge Gainsbourg, qui se réfugie toujours plus dans le personnage « Gainsbarre » de chanteur toujours éméché, l’actrice le quitte en 1980 pour rejoindre le cinéaste Jacques Doillon. Désespéré, le chanteur se réfugie chez Gérard Depardieu pendant trois jours, trois jours pendant lesquels il ne fait que boire pour noyer son chagrin.

La séparation entre Jane et Serge n’empêche pas la sortie d’albums formidables dans les années 80. En effet, la collaboration se poursuit par l'album Baby Alone in Babylone (1983, comprenant « Fuir le bonheur de peur qu'il ne se sauve » et « Les Dessous chics »), puis Lost Song (1987) et l'ultime Amours des Feintes (1990). La pochette de ce dernier opus reprend un portrait à l'encre de Jane Birkin, dessiné par Gainsbourg lui-même, hospitalisé peu avant sa mort et qui revient pour l'occasion à sa vocation première de peintre. La plume s'est brisée, maculant le dessin de quelques taches qui ont été gardées.

Amours des feintes

Depuis la disparition de Serge, Jane ne cesse de lui rendre hommage et d'interpréter son répertoire tant en studio que sur scène. Dans son journal intime paru en 2019, Jane écrit : « Et quant à Serge, même s'il me restait un million d'années à vivre, je ne pourrais jamais plus aimer quelqu'un autant que je l'aime lui ».

 

La première démarche qui s'impose est de prendre conscience que l'amour est un art, tout comme vivre est un art (Eric Fromm, l'Art d'aimer)

 

Fred Fontaine

pour PROMETHEAS

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